L'expérience est cette chose merveilleuse qui vous permet de reconnaître une erreur quand vous la faites à nouveau.

Il ne travaillait pas ce jour-là, ou plutôt, il avait bossé de nuit, lui laissant ainsi sa journée de libre pour vaquer à ses occupations. FP ne dort pas beaucoup, son rythme est fortement endommagé que ça soit par le boulot ou encore par la situation de sa famille, ainsi que celle des Serpents. En rentrant chez lui, le gaillard n’était pas tombé tout de suite dans le comas, il avait prit le temps d’envoyer un message à Anze, afin de lui fixer un rendez-vous chez Pop’s. Ensuite seulement, il s’était étalé sur son lit, finissant par avoir l’impression d’avoir une gueule de bois terrible malgré qu’il n’avait pas bu une seule goutte d’alcool, il avait succombé au sommeil. Le réveil ne fut pas bien difficile, quelques heures plus tard. Disons qu’il y a pire pour sortir un mec de ses songes. Puis une fois prêt à partir, il s’était rendu sur son lieu de travail, malgré le fait qu’il soit en congé. Quelques jours fortement attendu de la part du leader des Serpents du Southside. Quelques jours qu’il prendrait avec grand plaisir pour se reposer, sûrement durant le premier et les autres pour mettre son plan à exécution. Mais avant ça, il s’était assis, prenant juste un café pour patienter le temps que Anze arrive. L’attente ne fut pas bien longue non plus, ou bien le temps était passé plus vite, parce qu’une de ses collègues, en service ce coup-ci, s’était mise en tête de lui faire la conversation. Il faut croire que son air fermé ou le fait qu’il ait carrément la gueule dans le cul donnait l’impression qu’il était en pleine déprime. Pourtant, il n’en était rien et il remercia n’importe quelle divinité - même démoniaque s’il le fallait – quand le jeune Serpent arriva enfin. Sa collègue comprit qu’elle devait retourner à ses occupations et les laisser tranquille. « Salut. Ouais si t’as des infos pour moi, je suis preneur. On est sur le point de monter un gros coup et c’est sûrement pas le moment d’avoir un traitre ou des troubles-faites dans nos rangs. T’as vu ou entendu quelque chose qui pourrait nous faire défaut dernièrement ? » FP faisait confiance à Anze. Il sait que ce Serpent est d’une loyauté sans pareil. C’est pourquoi il en a fait son informateur au près des plus jeunes. Il faut dire que ça soit FP, ou bien MP, Tall Boy, Jørgen ou bien d’autres anciens Serpents, ils ne peuvent se fondre auprès de la nouvelle génération pour prendre des informations. Les gamins craignent les anciens, alors c’est tout à fait naturellement, qu’il fallait prendre l’un des jeunes comme informateur. Anze est donc les yeux et les oreilles du leader. S’il avait choisi Jughead pour cette mission, tout le monde s’en serait douté. Tout le monde s’attend à ce que le fils de FP rapporte ce qu’il entend à son père et évidemment, quand il est dans le coin, les sujets changent presque naturellement.

Mais il y avait quand même un autre truc qui turlupinait le Serpent en chef. Une main autour de sa tasse chaude, où demeurait encore une moitié de café brulant, il jeta un œil vers la fenêtre. La moto de Anze se trouvait garée non loin de la sienne. « C’est ta bécane qui faisait ce boucan ? Tu sais que Jørgen te la retaperait gratuitement. »

L'expérience est cette chose merveilleuse qui vous permet de reconnaître une erreur quand vous la faites à nouveau.

Ce n’était pas la première fois qu’il entendait parler d’Arizona. Beaucoup venaient se plaindre de cette tarée qui n’en faisait clairement qu’à sa tête. Elle est sur la tangente et FP n’attendait qu’une grosse connerie de sa part pour la virer du gang. Il semblerait d’ailleurs que Anze lui rapporte cette fameuse bêtise tant attendue. Déjà qu’elle dénigre, à qui veut l’entendre, les plus âgés des Serpents, n’ayant de respect pour personne, il est grand temps de prendre les mesures nécessaires contre elle. Il en touchera deux mots à Gladys, Jørgen et MJ. « Attends, elle t’a tiré dessus, tu veux dire volontairement ou c’était un accident ? » Et deuxièmement, un truc l’intriguait dans la suite des propos de Anze. « Comment s’est-elle procurée une arme ? Seuls les Serpents aguerris et sains d’esprit en possèdent. » Ce qui n’est certainement pas le cas de cette dingue.

FP savait que les jeunes voulaient de l’action. C’est ce qui traduit leur manque d’expérience. En tant que chef et étant lui-même père, il n’a pas l’intention de les envoyer aveuglement au casse-pipe. Son plan est monté et prêt à être mis en place, inutile de se montrer bêtement impulsif. A quoi ça servirait ? Que les jeunes gâchent leurs vies en terminant en taule durant des décennies ? Qu’ils soient grièvement blessés ou pire...morts ? Lorsqu’il était en prison, le gang a été géré par des jeunes et voilà où ils en sont aujourd’hui à cause de décisions prises à la légère. Mais le fait que Anze lui dévoile une autre information, concernant la rouquine de service, étira simplement un côté de ses lèvres. « J’ai confiance en mes Serpents. Ils savent qui sont leurs supérieurs, ils n’obéiront jamais à une petite garce sans cervelle et pétée de tunes. Mais ça va me permettre de tester la loyauté des jeunes. Arranges-toi pour avoir une liste des Serpents présents à sa petite réunion. » Il resta pensif en terminant son café et en écoutant les paroles du jeune homme concernant sa moto. N’haussant que les épaules en voyant qu’il ne comptait pas saisir l’opportunité, il revint tout de même sur un autre point. « Et Jughead ? Il se fait discret en ce moment ? » FP a confiance en son gamin mais c’est que le jeune Serpent ne peut pas s’empêcher de s’attirer des emmerdes. Et s’il est dans le collimateur de quelqu’un, il aimerait le savoir avant qu’il ne soit trop tard. Il n’a pas envie de retrouver son gamin dans un état déplorable, voir pire. « On a un plan et il n’y a pas que les Serpents dans le coup. Mais il ne faut pas que les jeunes déconnent, c’est pas des enfants de choeurs qui sont nos associés dans l’histoire. Tout le monde ne sera pas dans la confidence, pour éviter les fuites ou que certains se prennent pour des super-héros… Par contre, reste sur tes gardes, le moment venu, on aura besoin de toi. »

Sa collègue repassa dans le coin avec le café chaud. Elle s’arrêta près d’eux et FP poussa sa tasse pour qu’elle en verse dedans. « Tu bois quelque chose ? » Proposa-t-il au jeune homme.